Depuis son origine, la Gorsedd de Bretagne s’est préoccupé de la vie de la cité, au sens premier qu’on assigne à la politique. Pourtant, elle ne s’est jamais engagée dans les luttes politiciennes, elle n’est pas un parti politique. La Gorsedd se situe au dessus de la mêlée, elle n’est ni dans un camp ni dans un autre.
Ses prises de position, qui restent finalement rares et limitées, sont basées sur ses propres valeurs ( défense de la Bretagne, de sa culture, de ses habitants, de son environnement, droits de l’homme etc.). Elle donne son point de vue quand des mesures prises par les gouvernants portent atteinte aux valeurs qui l’animent.
Elle a soutenu le combat de Plogoff par le passé, interpellé le Président de la République sur la ratification de la Charte européenne des langues minoritaires, défendu les Roms transformés en boucs émissaires, condamné la déchéance de nationalité qui créait une ségrégation entre les citoyens, s’est déclarée solidaire de la lutte des habitants du Centre-Bretagne contre les extractions minières, appelé aux manifestations en faveur de la réunification de la Bretagne, condamné le racisme, condamné le silence de l’Europe face aux violences policières de la police espagnole en Catalogne, approuvé la désobéissance civique des lycéens bretons utilisant la langue bretonne aux examens malgré l’interdiction, fait écho à la résistance des parents du petit Fañch Bernard pour pouvoir orthographier le prénom de leur enfants suivant les principes de la langue bretonne, toutes actions s’inscrivant dans le champ de la politique au sens noble du terme.
Certains pourraient penser que ce n’est pas l’affaire des Druides. Pourtant le seul Druide historique connu, Diviciacos, a bien joué un rôle politique au service de son peuple, les Éduens. On peut ne pas approuver son choix de s’allier aux Romains mais Diviciacos, dans son rôle politique, était loin d’être un cas isolé ainsi que le rapporte M. Jean Louis Brunaux dans son ouvrage sur les Druides paru en 2006 aux Éditions du Seuil : « L’aspect probablement le plus remarquable du druidisme, qui le distingue des religions antiques, est l’engagement de ses représentants dans la vie sociale et politique. En Grèce et à Rome, l’exercice du pouvoir est nettement séparé de la pratique religieuse (…). Les deux activités demeurent autonomes (…). Les druides, au contraire ne se situent ni dans un camp ni dans l’autre, mais au contraire au dessus d’eux. (…). Leur domaine de prédilection en politique semble être la réflexion sur les constitutions et sur les rapports entre les différents États gaulois.(…) Cette position particulière des druides est très exactement celle qu’occupent les Pythagoriciens en Grande-Grèce : leur sagesse les situe à mi-chemin entre religion et politique, il serait plus juste de dire qu’elle les place, comme les druides, au dessus de ces deux pratiques sociales suffisamment haut pour en neutraliser les effets pervers, mais pas au point qu’ils s’interdisent toute action sur elles, Pythagore, comme les druides, aurait donné des constitutions et des lois aux villes de Grande-Grèce et aurait fait disparaître les discordes entre elles. » ( Les Druides. Des philosophes chez les Barbares, p.186). Le même auteur rapporte également l’action réformatrice des Druides notamment pour supprimer les sacrifices humains. Il démontre le rôle propagandiste des auteurs latins en particulier, qui en se copiant les uns les autres, ressassent inlassablement le thème des sacrifices humains pour donner une image repoussante et terrifiante des Druides et justifier ainsi la conquête de la Gaule ou de la Bretagne insulaire en disqualifiant l’âme de la résistance aux envahisseurs.
Bien sûr, aujourd’hui nous vivons dans un autre monde, dans une démocratie représentative et nous ne prétendons nullement guider la vie politique actuelle, nous souhaitons seulement apporter notre modeste pierre à la préservation et la construction d’un État de droit le plus démocratique possible. En ce sens, nous voulons rester fidèles à l’action de nos prédécesseurs.